J'aurai passé au Congo une année de volontariat de solidarité internationale extrêmement riche en aventures, expériences, acquisitions de nouvelles connaissances/compétences...
Je vais sûrement ne garder à terme que les bons souvenirs. Il y en a eu tant. Mais il y a eu aussi des moments très difficiles, surtout s'agissant des conditions d'exercice de ma mission...
Je remercie tous ceux qui m'ont aidé et assisté dans ces périodes pénibles. Grâce à eux j'ai pu tenir jusqu'au bout et continuer à donner le meilleur de moi même jusqu'au dernier jour. Je remercie tous les membres de ma famille qui se sont efforcés de garder le contact et de me donner des nouvelles du pays.
Je veux juste ci-dessous, à quelques jours de mon départ, vous faire part des pensées et des images qui ont traversé mon esprit ces derniers temps. Certaines sont assez globales, d'autres sont liées à des événements récents.
CHOC DES CULTURES ! Au terme de ma mission au Congo, quelques réflexions :
- l'élément structurant d'une société du Sud est le relationnel et la soumission et non pas, comme au Nord, le fonctionnel et l'adhésion ; dans ce contexte l'avènement de la compétence, la primauté de la pertinence, le changement de rupture (substitutif et pas seulement additif) sont des chantiers perdus d'avance ou presque... Logique conservatoire /VS/ Logique évolutive...
- le choc culturel est toujours au niveau de l'implicite, c'est à dire qu'il vous arrive dans la gueule avant même que vous ayez compris quoi que ce soit...
- toutes les cultures sont fondamentalement racistes, sans exception ; sauf peut-être à imaginer une culture dont le ressort serait le changement instantané et permanent de ses propres valeurs/croyances/tabous/usages/attitudes/paradigmes.../etc./... (bonjour les dégâts !).
FATALISME ET INFANTILISME ! Un mal incurable semble avoir atteint tout le corps social congolais. Ce mal c'est l'acceptation fataliste du malheur et de l'injustice qui frappent tous les jours ce pays qui pourtant dispose de toutes les ressources pour se développer.
Tout est corrompu, tout est pourri.
Rien ne marche, rien ne se fait.
La santé ? - Nul. L'éducation ? - Nul. Les infrastructures ? - Nul. L'eau, l'électricité ? - Nul. L'agriculture et l'autosuffisance alimentaire ? - Nul. L'industrialisation ? - Nul. La démocratie ? - Nul. La culture ? - Nul. La propreté ? - Nul. Nul. Nul....
Tout le monde le sait, mais tout le monde l'accepte. Car refuser la situation c'est se condamner à être malheureux une deuxième fois...sans que pour autant son courage ne serve à changer quoi que ce soit.
Alors on préfère passer les matinées à prier et les soirées dans les ngandas ou dans son 2°/3°/... bureau...et faire la fête le Dimanche dans les paroisses après une bonne messe de 3 heures. Pitié, pitié, pitié !
FRANC-MAÇONNERIE. Pour s'en sortir dans ce pays il n'y a qu'une solution qui ne dépend pas vraiment de vous. Il faut être issu d'une famille riche ou proche du pouvoir, ou pouvoir compter sur un "papa" fortuné et puissant/influent. Il y a ensuite une condition à remplir pour que cette solution fonctionne vraiment c'est à dire vous permette de prendre un bon ascenseur social : se faire introduire et accepter dans une loge maçonnique. Je ne pensais pas que la franc-maçonnerie puisse être si importante ici. Même l'Église y envoie ses représentants principaux. Elle infeste toute la haute administration, elle contamine toutes les personnes ayant un poste important dans le public ou le privé...et qui veulent le garder. Bien entendu c'est une franc-maçonnerie à l'Africaine, où le fétichisme, le sexe et les sacrifices (y compris humains!) ont une grande place. Brrr !
TRAIN ! Le Chemin de Fer Congo-Océan (CFCO) - qui relie Brazzaville à Pointe-Noire - a encore tué dans la nuit du Lundi 21 au Mardi 22 juin !!! Plusieurs wagons (6 à 8) bondés de voyageurs sont tombés dans un ravin. L'accident s'est produit à Yanga, entre les localités de Bilinga et Tchitondi, entre Pointe-Noire et Dolisie. Les premières victimes et les blessés ont été conduits pour l'essentiel dans les morgues et vers les hôpitaux de Pointe-Noire.
Il y aurait près d'une centaine de morts (difficile à savoir ici) et des centaines de blessés. Imaginez un train vétuste (où les voyageurs peuvent être jusqu'à 300 dans un wagon), roulant à vive allure dans un virage sur une ligne vétuste, conduit par une paire de chauffeurs imbibés de Primus...
Tout accuse le gouvernement, mais le gouvernement et la compagnie nient toute responsabilité, et mettent en cause purement et exclusivement l'excès de vitesse du chauffeur.
Faute de moyens logistiques les secours sont intervenus trop tard dans bien des cas. Des dizaines de personnes sont mortes sur place faute d'avoir pu être soignées à temps.
Un élan de générosité extraordinaire de la population a permis de récolter des montagnes de médicaments et de vivres. Toutes choses qui hélas ne serviront à rien ou presque...
POLICE ! Le 19 juin j'ai déjeuné chez la gouvernante de Sassou N'Guesso - Président du Congo Brazzaville - en compagnie de Mgr JC Makaya Loemba, évêque de Pointe-Noire, du Directeur Général de la Police Nationale, Jean François Ndenguet, du Directeur de la Police de la province du Kouilou et du Directeur de la DST de ...Pointe-Noire.
Cette rencontre était-elle un pur hasard, ou a-t-on voulu me délivrer un message ?
FOOT ! J'ai assisté dans la rue au match Mexique-France retransmis sur écran géant au rond point Lumumba à Pointe-Noire. Tout le plus public congolais était mexicain - ou plutôt antifrançais - dès le coup d'envoi. C'est dans ces moments là que remontent à la surface les frustrations et les rancoeurs accumulées d'un peuple noir exploité et méprisé par la France pendant des années...
Bon, d'accord, ils étaient anti-Domenech comme moi, et tout comme moi sentait que les 11 joueurs français formaient une équipe sans solidarité, sans détermination, et surtout sans âme.
OK. Mais j'avoue que j'étais très mal à l'aise... J'ai préféré quitter les lieux discrètement dix minutes avant la fin.
...
A propos, je n'accepte pas que l'on puisse inférer la situation sociologique, mentale, comportementale, culturelle des Français à partir du comportement d'une équipe de Foot qui serait le reflet de la société française.
Je ne me reconnais pas dans les comportements de ces joueurs (sur le terrain ou dans les vestiaires).
J
...e ne reconnais pas le droit à quiconque d'affirmer que si une équipe de foot joue mal c'est parce que son peuple va mal, ou le contraire...
Il y en a marre de toutes ces analyses réductrices claironnées par des personnalités aussi merdiques que médiatiques, qu'elles s'appellent Finkielkraut ou autre.
En France, comme ailleurs, il y a des cons, des fous, des meurtriers. Dira-t-on que parce qu'il y a des assassins et des gens dérangés derrière les barreaux, tous les gens bien portants, sains d'esprit et bons citoyens doivent eux aussi aller en prison ?