mardi 30 mars 2010

Carton rouge au "Centre de Mineurs", la maison diocésaine d'accueil des enfants de la rue de Pointe Noire.


J'ai revisité tout récemment le "Centre des Mineurs" du diocèse, un centre d'accueil et de formation pour enfants de la rue. Encore un. Cela devient ma spécialité à l'extérieur de l'évêché. La raison pour laquelle j'ai fait cette démarche est que j'ai récemment rencontré le Directeur "Social Programs & Communication" du groupe Chevron (groupe pétrolier américain...). Je suis allé inspecter ce centre avec les responsables locaux de Caritas (en France = Secours Catholique). Je suis tombé sur le cul (façon de parler), tellement c'était scandaleusement dégueulasse. Je me suis fâché. 

Jugez vous-même. 15 adolescents parqués comme des animaux, sans moustiquaire, sans eau (une bache vide, pas de surpresseur...), sans nourriture ou presque (personne pour leur faire la bouffe), vivant dans la saleté, les chiottes bouchées remplies de merde (donc la fosse septique pleine, etc...)...Et j'en passe.

J'ai tenu à rencontrer tous les responsables. Je leur ai dit que c'était une honte et que soit on faisait immédiatement le nécessaire pour nettoyer et humaniser ce lieu soit je prenais moi-même l'initiative de demander la fermeture du Centre et l'évacuation des enfants.

J'ai fait un rapport immédiatement à l'évêque qui, dès le lendemain, m'a donné raison et a ordonné l'exécution de toutes les actions d'urgence que j'avais demandé : nettoyage des sanitaires, vidange, nettoyage et remplissage de la bache, achat de vivres de première urgence, recrutement d'une cuisinière pour faire la bouffe à ces petiots. De mon côté je me suis chargé d'aller récupérer des moustiquaires neuves à St Jean Bosco... 

Non mais... !

Dans cette histoire l'évêque n'est pas tout blanc, loin s'en faut, et c'est exactement pour cette raison qu'il a immédiatement réagi. En fait il avait placé son frère (papa Marcial) à la tête du Centre (qui abrite par ailleurs un centre professionnel  - en fait un atelier de coiffure - pour les filles-mères, ces jeunes femmes sans ressources qui se retrouvent enceintes et que leur famille, si elle existe, abandonne...). Mais avec le temps il ne s'occupait plus  que de l'atelier de coiffure.

Le Centre des Mineurs devrait normalement être géré par la procure. En pratique il était géré jusque hier en circuit fermé (entre l'évêque, son frère et Caritas, avec la complicité d'un fonctionnaire de l'État). Là aussi j'ai mis les pieds dans le plat. Je n'ai pas eu à me faire prier. Comme quoi l'évêque craint quelque chose (que je fasse un rapport au nonce apostolique ou que je fasse de la contre-publicité ?...). Car dès le lendemain j'ai fait ouvrir un compte courant à la procure au nom du Centre. On a viré une grosse somme sur le compte grâce à des nouveaux revenus immobiliers que nous avons, ce qui nous a permis de faire immédiatement toutes les dépenses précitées.

Dans une semaine j'irai voir ce qu'il en est sur le terrain. Il va falloir qu'on nomme un vrai responsable, consciencieux, débrouillard, capable de rendre compte, de faire et de porter des projets...

J'ai prévenu que tant qu'il n'y aurait pas une nouvelle dynamique il était hors de question qu'on sollicite Chevron et en tout état de cause hors de question qu'on leur fasse visiter les lieux.

Depuis le temps que ce centre existe il pourrait y avoir une cinquantaine d'enfants sur place...

Les autres organisations locales qui s'occupent d'enfants de la rue seraient déjà morts de rire n'était la triste gravité de la situation.



samedi 20 mars 2010

Ils ont réussi. La troupe "Jeunesse en éveil" est parti au Burkina.


Tous à Ouagadougou ou va se tenir le 12° Festival International de Théâtre pour le Développement, le FITD 2010 ! (sauf moi qui suis scotché à l'évêque du Kouiloulalahihou).

Parmi les petites choses que j'ai réussi à faire au Congo, il y aura au moins celle-ci : contribuer de manière déterminante à ce qu'une petite troupe de théâtre amateur - "Jeunesse en éveil" - puisse trouver la motivation et l'argent nécessaire pour participer à un festival au Burkina-Fasso.
Miraculeux.
Ne me demandez pas comment j'ai fait... Rien de plus honnête, mais çà serait long à expliquer.
En tout cas ils sont partis le 16 mars 2010.

En raison du coût élevé (tout est relatif) du voyage ils n'étaient que quatre à partir : Borjois (le metteur en scène), l'abbé Jean Gilbert Mavoungou (prononcer "JJ" : écrivain et superviseur de la troupe), Aymar (le directeur artistique) et une seule fille, Princilia (la femme indispensable) !
En conséquence il y aura des malheureux, comme Rodez, Félix et Mesmin par exemple...

Je vous renvoie au post que j'ai déjà écrit sur ce blog le 25 novembre 2009 http://ex-africa.blogspot.com/2009/11/je-me-lance-dans-le-theatre.html.

Là-bas ils vont jouer "Le Plat de Vipère", une oeuvre de...l'abbé Jean Gilbert Mavoungou (eh oui il va jouer sa propre pièce), une histoire drôle qui met en avant le rôle souvent décisif des femmes dans la nécessaire transgression des tabous en Afrique pour permettre à la tradition d'accueillir la modernité.

Pour suivre leurs aventures, rien de plus simple. Rendez-vous sur le site officiel de l'Atelier Théâtre Burkinabè

Au retour ils vont passer une semaine au Bénin dans la famille de JJ. Ah c'est beau la culture quand elle profite aussi à la jeunesse oubliée des banlieues africaines !

Bonne prestation à tous les comédiens !



dimanche 14 mars 2010

Visite des Enfants de la Rue de Saint jean Bosco














Aujourd'hui 14 mars, retour en force de la saison des pluies. Déluge ! Une occasion pour moi de délaisser la côte et d'aller au contact des enfants de la rue avec mon ami Charles (en chemise bleue sur la photo). Les autres moundélés sont des italiens de l'ENI (pétrole). Le père Valentino, en orange, est facilement repérable (il a eu un problème cardiaque hier, il faut dire que le taux d'humidité est à son maximum en ce moment et outre le fait qu'on dégouline littéralement, la sensation de chaleur et d'étouffement était forte pour tout le monde).
La maman en boubou c'est Michèle. Elle s'occupe des gosses le Dimanche.
Quand nous sommes arrivés nous avons organisé des jeux et un concours de dessin. D'où la thématique de mes photos "to-day".
Ils sont mignons non ?
Voili.
Gros Bisous

dimanche 7 mars 2010

Visite à l'Orphelinat de "L'Amour de Dieu"

Je suis allé samedi 7 mars, en compagnie de l'abbé Lelo (l'aumônier du Port de Pointe Noire qui m'avait fait visiter le Siroco) et du programmateur de Radio Maria, rendre visite à 45 orphelins de Ngoyo (près de P-N en allant vers le Kabinda).
L'Orphelinat de L'Amour de Dieu - en Afrique on n'a pas peur des mots - a été créé et est dirigé par une femme, maman Françoise, à qui je veux rendre un hommage admiratif appuyé à quelques heures de la Journée de la Femme.
Avec le Centre des Mineurs de Voumvou qui dépend du diocèse, c'est un des rares orphelinats digne de ce nom dans toute la région de Pointe Noire.
Comme partout en Afrique les "enfants de la rue" sont nombreux dans la capitale économique du Congo qui se développe à toute vitesse laissant les pauvres sur le carreau et en particulier les enfants...
Françoise essaie actuellement d'obtenir des fonds de la banque mondiale.

J'ai été frappé par la gentillesse et le sourire des enfants.

Nous avons aussi visité l'école (de la maternelle à la 4°) qui reçoit 400 élèves chaque jour dans des conditions vraiment peu confortables. Cette école est également dirigée par Françoise.
355 élèves qui paie 3000 Francs par mois (les 45 orphelins ne paient pas évidemment) çà fait grosso modo 1 million par mois pour payer 16 professeurs et entretenir les lieux...

J'ai beaucoup aimé la visite de l'exploitation maraîchère et piscicole de l'orphelinat. 
J'ai beaucoup insisté pour qu'on me montre les quatre bassins d'élevage de carpes et de tilapias (cf. photos)

Putain qu'est-ce que je fous dans un évêché pourri avec un évêque tordu !
Il y a tellement de beaux projets humanitaires où j'aurais pu m'investir...























mercredi 3 mars 2010

Folie épiscopale : le Nonce Apostolique débarque


[sur cette photo le Nonce se trouve au milieu, à côté de Sassou N'Guesso]

Non ce n'est pas la N'Gok qui me fait délirer (il y a une pénurie de bière N'Gok en ce moment àPointe-Noire et Dieu sait à quel point çà rend la vie beaucoup plus dure ici ; obligé de se rabattre sur la Primus : pouah!!!). 

Le délire épiscopal est bien réel ici dans le diocèse du Kouilou. Les délires... Car les épisodes délirants de la vie à l'évêché s'enchaînent dorénavant à une vitesse...folle.

Dernier en date de ces délires l'enquête menée par le nouveau nonce apostolique du Congo et du Gabon Mgr Jan Romeo Pawlowski le 18 mars 2009. Il a débarqué de Brazzaville à Pointe-Noire le 24 février 2010. 

Pendant deux jours il a procédé à une audition de tous les prêtres diocésains (60 environ) à Loango dans le Monastère de la Visitation (il porte bien son nom celui-là).

Au cœur de cette procédure, notre cher évêque, Mgr Jean Claude Makaya Loemba, mis en cause dans différentes pétitions dont certaines sont remontées au Vatican (déjà lors de son voyage à Rome pour le synode des évêques d'Afrique en octobre 2009 l'évêque m'avait informé par mail d'une lettre pour laquelle il était convoqué au Vatican), et dont certaines demandent purement et simplement la destitution ou la démission de "Tonton".

Ce n'est pas la première fois qu'un nonce débarque à Pointe-Noire pour enquêter, que la brigade financière du Vatican descend ici pour perquisitionner, que d'autres évêques du Congo sont venus jouer les médiateurs (comme Mgr Mizonzo, évêque de Dolisie, par exemple)...

Et ce n'est sans doute pas - hélas! - la dernière...

Au cœur des critiques le comportement humain de l'évêque qui asphyxie la vie du diocèse et paralyse les initiatives, et son comportement de manager notamment sur le plan de la gestion.

Gestion ? Vous avez dit gestion ? Mais alors je suis concerné ? 

- Mais oui mon petit Moundélé, tu te retrouves bon gré mal gré au cœur de la tourmente.

Et de fait plusieurs griefs formulés par les prêtres concernent directement l'ingérence de l'évêque dans la gestion de la Procure. Certains m'ont même cité dans leurs déclarations, pas en mal, mais plutôt en tant qu'acteur qui peut témoigner, qui sait...

Çà n'a pas trainé. Dès le lendemain de l'audition l'évêque s'est précipité comme un ouragan (disons une tempête genre Xynthia) dans mon bureau. Il m'a clairement indiqué qu'il me considérait comme complice des putschistes ; il a prononcé le mot de "complicité"... Il est très en colère contre moi. Je ne rentre pas dans les détails mais il me reproche d'avoir donné à un prêtre (l'abbé Léandre - pour ne pas le nommer - curé d'une paroisse de brousse, Pounga) des informations (que j'avais parfaitement le droit et même le devoir de lui donner) sur l'état du compte de sa paroisse en ce qui concerne les subsides (entendez subventions) de Rome.

J'ai découvert par hasard qu'il y avait plein d'argent sur ce compte. Je suis allé voir l'évêque pour en savoir plus. Celui-ci m'a dit : "Serge, ne vous occupez pas du passé". En clair : il y a de l'argent mais faites comme s'il n'y en avait plus, le reste çà ne vous regarde pas...

J'ai quand même voulu donner la position de son compte au curé...Mal m'en a pris.L’abbé Léandre a exposé tout cela devant le nonce. L’évêque a dû s’expliquer. Il a déclaré devant tous les prêtres que s’il voulait son argent il n’avait qu’à venir le chercher à la procure. Putain...

C'est  donc sinon la guerre, la « gueule ». Car il me fait la gueule le père évêque. Et il ne rate pas une occasion de m'emmerder.

Dans ce contexte il va falloir voir à voir comme dit l'autre. Voir à voir si çà ne serait pas plus sage pour moi de retourner brouter sur les verts pâturages charentais, ou à tout le moins de changer de crémerie africaine. 

Il se trouve que le chargé de mission de la DCC débarque (lui aussi...décidément) à Pointe-Noire le 9 mars prochain. 

Je vais avoir plein de choses à lui raconter. 

J'espère qu'il pourra m'aider à y voir plus clair dans le noir.

A suivre...